Paléontologie




La paléontologie est la discipline scientifique qui étudie les restes fossiles des êtres vivants du passé et les implications évolutives ressortant de l'étude de ces restes.





Frise de la Paléontologie, au fronton de la galerie de paléontologie du muséum de Paris, par André-Joseph Allar.


On distingue trois principales formes de paléontologie :



  • La paléontologie systématique : son objectif premier est l'étude des phylogénies sur la base de l'observation scientifique des fossiles ;

  • La paléontologie générale ou fondamentale : son objectif premier est de comprendre les problèmes généraux que la démarche systématique permet de découvrir : relations entre les êtres vivants disparus ou actuels, leurs évolutions, et, à plus large échelle, l'évolution des êtres vivants, des milieux et des climats au cours des temps géologiques ;

  • La paléohistologie[1] est l'étude fine des tissus fossilisés, avec une vaste palette d'objectifs et d'applications, allant de la reconstitution approfondie (exemple : coloration du plumage d'Archéopteryx) à la paléontologie du développement[2], notamment avec l'appui de la phylogénétique moléculaire et assimilés (exemple : comparaison du collagène de Tyrannosaurus rex avec celui des oiseaux actuels[3]).


Le travail paléontologique comporte généralement quatre étapes :



  • La prospection et les fouilles sur le terrain : c'est la partie la plus ardue, la plus physique, et administrativement compliquée : après obtention de tous les accords nécessaires, du matériel et des fonds, après le transport sur site, il s'agit de quadriller, mesurer, photographier, cartographier, extraire, préserver, emballer les fossiles, tamiser le sédiment, classer les trouvailles, les conditionner pour leur transport... ;

  • L'analyse et l’étude en laboratoire (voire dans un accélérateur de particules comme l'ESRF) des fossiles après déballage des colis ; le conditionnement des trouvailles, les moulages, l'attribution des fonctions (collection d'étude, muséologie, échanges...) ;

  • La description et publication scientifique des fossiles et des résultats d'étude, la reconstitution des êtres fossilisés et de leurs milieux d'origine ;

  • La diffusion pour le grand public des connaissances ainsi acquises (exposition au public, livres, autres publications, documentaires...).




Les musées d'histoire naturelle (ici, celui de Florence en Italie) ont un rôle majeur, avec les universités, dans la conservation des collections, leur étude scientifique et leur présentation au public.




Sommaire






  • 1 Étymologie


  • 2 Organisation


  • 3 Pratique


  • 4 Phylogénie


  • 5 Paléontologues célèbres


  • 6 La reconstitution paléontologique[6]


  • 7 Dans la culture


  • 8 Notes et références


  • 9 Voir aussi


    • 9.1 Bibliographie


    • 9.2 Articles connexes


    • 9.3 Liens externes







Étymologie |


Le mot paléontologie peut être découpé en trois termes grecs :




  • paleo, de palaios, ancien ;


  • ontos, participe-présent du verbe être : « étant » ;


  • logie, de logos, l'étude, le discours.


Il s'agit donc, littéralement, de la « science étudiant la vie ancienne » et, plus précisément, de la discipline qui étudie les organismes disparus ayant laissé dans les terrains sédimentaires des restes de leur corps ou des traces de leurs activités. Ces restes ou traces sont appelés fossiles.


Ce terme a été créé en 1822 par le zoologiste Henri Ducrotay de Blainville et diffusé en Europe par le géologue britannique Charles Lyell[4].



Organisation |


La paléontologie est largement pluridisciplinaire. « Faire parler » les fossiles est un travail complexe et analytique qui déborde de la simple observation. Des techniques de chimie, de physique et les statistiques sont couramment utilisées en plus du bagage traditionnel propre à la paléontologie, le tout sous l'égide disciplinaire de la géologie. Cependant, la paléontologie est longtemps restée divisée en deux domaines principaux : la paléozoologie qui étudie les animaux, et la paléobotanique qui fait de même pour les végétaux.


Elle se diversifie, depuis les années 1960, en participant à des approches fondamentalement pluridisciplinaires qui deviennent autant de disciplines nouvelles et interconnectées : la paléoécologie, la paléobiochimie, la paléoclimatologie, la paléogéographie, etc. Elle recouvre également de nombreuses spécialités, fonction en particulier du type de fossile considéré : la micropaléontologie se focalise ainsi sur les fossiles de taille microscopique, la palynologie étudie avec des techniques particulières les microfossiles à paroi organique (spores, pollens...), la paléoichnologie se consacre aux traces laissées par les animaux (pistes, terriers...), la paléocoprologie à l'étude des excréments, il faut aussi étudier entre 5 et 8 années.




Galerie d'Anatomie comparée et de Paléontologie - Muséum national d'histoire naturelle



Pratique |


À l'aide des fossiles, que l'on retrouve essentiellement dans les roches sédimentaires, on tente de reconstituer les êtres vivants tels qu'ils étaient, leur environnement et de déterminer l'époque à laquelle ils ont vécu.


L'observation des caractères prévalant aujourd'hui pour tirer des conclusions sur les mondes d'hier est souvent utilisée : c'est le principe de l'actualisme. Avec de nombreuses études de ce genre, on a pu établir une échelle des temps géologiques. Cette échelle est découpée en morceaux de différentes longueurs définis par les organismes présents, des événements climatiques, etc. : ères, périodes, époques, étages.


L'étude de fossiles « humains » (genres Homo et apparentés) utilise les mêmes méthodes que celle de la paléozoologie. Elle n'en constitue pas moins une science distincte, la paléoanthropologie, dont l'objet est l'étude de l'évolution de l'Homme ; ses spécialistes effectuant une synthèse des connaissances provenant d'autres disciplines comme l'anthropologie et l'archéologie.



Phylogénie |



« Le coup d'œil sur l'Histoire, le recul vers une période passée ou, comme aurait dit Racine, vers un pays éloigné, vous donne des perspectives sur votre époque et vous permet d'y penser davantage, d'y voir davantage les problèmes qui sont les mêmes ou les problèmes qui diffèrent ou les solutions à y apporter. »



— Marguerite Yourcenar, extrait de l'émission radiophonique Concordance des temps de Jean-Noël Jeanneney.





Classification phylogénétique prenant en compte les résultats de la paléontologie, de la cladistique et de la génétique, par Guillaume Lecointre & Hervé Le Guyader (2006) et d'après Purificación López-García & David Moreira (2008)[5].


Un des objectifs de la paléontologie est de reconstituer l'histoire de l'évolution par l'étude des synapomorphies. Cependant, le but n'est jamais de trouver les espèces intermédiaires entre deux espèces car il n'y a donc pas d'intermédiaires-ancêtres à trouver mais des intermédiaires structuraux à définir. Les Archaeopteryx et les oiseaux de l'ère secondaire, tout comme les poissons à poumons et bien d'autres, sont des intermédiaires structuraux. Les probabilités de trouver « les ancêtres réels » des chaînes généalogiques étant infimes en paléontologie (et même si on les trouvait, il ne serait pas sûr qu'ils soient reconnus), on se « contente » fort bien des intermédiaires structuraux pour confirmer ou infirmer les « modèles généalogiques ».



  • Histoire de Bos taurus

  • Histoire des cétacés

  • Histoire des équidés

  • Histoire des oiseaux

  • Histoire des siréniens



Paléontologues célèbres |





  • Georges Cuvier (1769-1832)


  • Philippe-Charles Schmerling (1791-1836)


  • Alcide Dessalines d'Orbigny (1802-1857)


  • Louis Édouard Gourdan de Fromentel (1824-1901)


  • Henry Testot-Ferry (1826-1869)


  • Othniel Charles Marsh (1831-1899)


  • Edward Drinker Cope (1840-1897)


  • Franz Nopcsa (1877-1933)


  • Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955)


  • Paul Wernert (1889-1972)


  • Véra Gromova (1891-1973)


  • Louis Seymour Bazett Leakey (1903-1972)


  • René Lavocat (1909-2007)


  • Jean-Pierre Lehman (1914-1981)


  • Sándor Bökönyi (1926-1994) paléozoologue


  • Yves Coppens (1934-)


  • Henry de Lumley (1934-)


  • Marie-Françoise Bonifay (1935-)


  • Philippe Taquet (1940-)


  • Michel Brunet (1940-)


  • Stephen Jay Gould (1941-2002)


  • Robert T. Bakker (1945-)


  • Jack Horner (1946-)


  • Éric Buffetaut (1950-)


  • Brigitte Senut (1954-)


  • Neil Shubin (1960-)


  • Francis Duranthon (1961-)


  • José Braga (1967-)







Reconstitution paléontologique d'un mammouth, au Muséum de Paris.



La reconstitution paléontologique[6] |


Les paléontologues reconstituent, à partir des fossiles et par les méthodes de l'anatomie comparée inaugurée par Georges Cuvier, la morphologie des plantes et des animaux disparus. La palynologie leur permet de reconstituer la flore, l'ichnologie - les déplacements, les dentitions et les coprolithes - les régimes alimentaires, divers autres indices - les climats... mais une fois cela établi, des artisans, illustrateurs, ingénieurs du son ou cinéastes doivent « mettre en vie » les reconstitutions. Leur rôle est très important, leurs réalisations ont marqué les imaginations, suscité des vocations, permis le financement d'expéditions. Dès le XIXe siècle, à Londres, les reconstitutions du Crystal Palace ont créé un engouement pour les Dinosaures, et les vues d'artiste, polychromes ou non, d'espèces préhistoriques se dressent souvent à l'entrée des musées à vocation paléontologique (comme devant la galerie de Paléontologie du Muséum de Paris) ou en illustrent l'intérieur (comme au Musée d'histoire naturelle de Londres).


Généralement, les fossiles ne donnent pas d'indication des couleurs, et celles-ci ne peuvent être qu'imaginées à l'exemple des êtres vivants actuels occupant des milieux homologues et ayant une éthologie comparable. Il en est de même pour les sons : si, exceptionnellement, certains crânes d'hadrosaures dans les crêtes desquels on a insufflé de l'air, ont pu produire une gamme de sonorités, le rythme et l'harmonie en resteront à jamais inconnus : là encore, on les imagine d'après les sons produits par les animaux actuels apparentés (on devrait d'ailleurs représenter les dinosaures plutôt sifflant comme des oiseaux, que rugissant comme des lions ou meuglant comme des bovins). Les reconstitutions (ou « reconstructions ») paléontologiques sont donc par définition, et l'on doit en avertir les publics, en partie conjecturelles, puisque même dans les cas rares de conservation dans l'ambre ou la glace, l'organisme est dégradé notamment au niveau chromatique ; il s'agit par la force des faits, de vues d'artiste, mais des vues qui, pour rester dans les limites de ce qui est admis par les chercheurs au moment où elles sont réalisées, doivent obligatoirement s'inspirer d'autres images déjà scientifiquement validées dans les publications spécialisées. Si l'on ne comprend pas ce processus de « conjecture restitutive », on ne peut que considérer comme « inexactes » ou « violant quelque copyright » la totalité des vues d'artiste, d'images de synthèse, de reconstitutions en volume existantes[7], et l'on amputera la paléontologie de toute son iconographie « grand public » y compris les œuvres de maîtres comme Mauricio Antón, Alain Bénéteau, Dimitri Bogdanov, Zdeněk Burian, Heinrich Harder, Charles R. Knight ou Édouard Riou, seules échappant à ce « grand ménage » les illustrations strictement scientifiques des articles spécialisés.


Tant qu'illustrateurs, artisans ou réalisateurs de films se conforment aux indications des paléontologues, la reconstitution paléontologique est une simple représentation documentaire, cadrée par la démarche scientifique qui ne vise qu'à une représentation la plus réaliste possible et limite la créativité personnelle. Mais cette représentation peut sortir du cadre documentaire et entrer alors dans le domaine de l'art, le plus souvent dans les domaines de la science-fiction (tels le livre et le film Jurassic Park) ou de l'« heroic fantasy » (tels le livre et la série Dinotopia).



Dans la culture |


Article détaillé : Mythologie.

Dans ses conférences et interviews, Guillaume Lecointre souligne que beaucoup de mythes anciens ont pu apparaître à la suite d'observations paléontologiques ou autres, mais sans analyse scientifique :



  • des fossiles marins en montagne ont pu donner lieu aux récits de déluges ;

  • des ammonites Ceratitida à enroulement incomplet ont été comprises comme des cornes de béliers géants (d'où leur nom) ;

  • des ossements de grande dimension ont accrédité l’existence de dragons, de trolls, de titans... ;

  • des crânes d’Elephas falconeri ont pu être interprétés comme des têtes de cyclopes (la fosse nasale étant prise pour une orbite unique)[8] ;

  • des crânes de gigantopithèques (perdus pour la science, qui ne dispose que de dents) ont pu initier du mythe du yéti ;

  • les volcans et les laves, comme bouches des enfers ;

  • des tentacules flottants d’Architeuthis (décrit scientifiquement en 1857 par Japetus Steenstrup), pouvaient être interprétés comme des serpents de mer géants ou des restes de kraken ;

  • des tourbillons associés à des céphalopodes géants ont pu donner le mythe de Charybde avalant l'eau et la recrachant sur les navires et de Scylla aux nombreux bras qui saisissent les marins[9] ;

  • les éclairs et la foudre ont pu être interprétés comme des colères divines.


En ce sens l’étude de la mythologie en relation avec la paléontologie, peut parfois mener les chercheurs à de nouvelles découvertes de fossiles, parfois même déjà en collection dans un établissement scientifique, comme dans le cas de Léonard Ginsburg qui retrouve en 1984, dans des collections anciennes, une caisse contenant des fossiles de grande dimension, qu'un forain du XVIIIe siècle avait présenté à travers la France comme étant « les ossemens du géant Theutobocus, roy des Teutons, tué par Marius à la bataille d'Aix en Provence » : il en identifie une dent comme étant celle d'un Dinothère, un éléphant disparu. Le mythe du géant Theutobocus, diffusé au XVIe siècle par Mazuyer, chirurgien à Beaurepaire, et par David Bertrand ou Chenevier, notaire, avait déjà été dénoncé au XVIIe siècle par un autre chirurgien, Jean Riolan, et au XIXe siècle par l'anatomiste Blainville[10].


Plus récemment, les paléontologues ont souvent été popularisés comme « chasseurs de fossiles » : une pratique d'amateurs qui est parfois pratiquée illégalement, éventuellement au détriment des archives fossiles et données scientifiques (déterrage sauvage, dégradation du contexte fossilisé, non-déclaration des « trouvailles », vol sur sites de fouille, trafic, etc), et qui doit beaucoup à la médiatisation des expéditions de Cope et Marsh aux États-Unis. L'œuvre cinématographique Jurassic Park a aussi contribué à populariser l'existence de la paléohistologie dans les fictions modernes, concurrençant l'autre principale source de fantasmes à « fossiles vivants » que sont les « mondes perdus » et la « résurrection » d'espèces éteintes.


Article détaillé : Mythe scientifique.


Notes et références |




  1. [1]


  2. « "developmental-palaeontology" »(en)


  3. « "Le collagène de T-Rex nous désigne ses cousins" »


  4. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, 1992


  5. (en) Purificación López-García & David Moreira, "Tracking microbial biodiversity through molecular and genomic ecology", Research in Microbiology, Vol.159, No.1, January-February 2008, p.67–73. DOI:10.1016/j.resmic.2007.11.019


  6. Stephen Giner, Miroirs de la Terre, Presses du Midi 2010, (ISBN 978-2-8127-0188-7), p. 14, 15, 129-133.


  7. C'est précisément le cas d'un grand nombre d'images paléontologiques, mais aussi archéologiques, historiques ou d'histoire navale, téléchargées dans Commons.


  8. Linda Gamlin, L'évolution, 1994, Gallimard, collection "La passion des sciences", Des éléphants de 90 cm au garrot par Stéphane Deligeorges (La Recherche) et Réponse à Tout, no 227, mai 2009, p. 44.


  9. Bernard Heuvelmans, Sur la piste des bêtes ignorées, Paris, Plon, 1955


  10. « Histoire véritable du Geant Theutobocus »(Archive • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) sur viaLibri



Voir aussi |



Bibliographie |




  • (en) The ancient life-history of the earth; A comprehensive outline of the principles and leading facts of palæontological science par h. Alleyne Nicholson (Livre ancien scanné dans le cadre du projet Gutemberg


  • Paléobiosphère, Patrick De Wever, Bruno David, Didier Néraudeau, MNHN, SGF et Vuibert 2010, (ISBN 978-2-7117-2503-8), 796 pp.


  • Les mondes disparus, Éric Buffetaut, Jean Le Loeuff, Berg international 1998, (ISBN 2-911289-14-5), 158 pp.


  • La Terre avant les dinosaures, Sébastien Steyer, Belin 2009, (ISBN 978-2-7011-4206-7), 205 pp.


  • Guide critique de l'évolution, Guillaume Lecointre (dir.) Belin 2009, (ISBN 978-2-7011-4797-0)


  • Classification phylogénétique du vivant, Guillaume Lecointre et Hervé Le Guyader, Belin 2001, (ISBN 2-7011-4273-3), 570 pp.

  • Thierry Tortosa (dir.), Principes de paléontologie, Dunod, septembre 2013, 336 p. (ISBN 978-2-10-05-7993-8, lire en ligne)

  • Dominique Grimaud-Hervé, Frédéric Serre, Jean-Jacques Bahain et al., Histoire d'ancêtres : La grande aventure de la Préhistoire, Paris IVe, Errance, coll. « Guides de la préhistoire mondiale », novembre 2015, 5e éd., 144 p. (ISBN 978-2-87-772590-3)



Articles connexes |



  • Histoire de la paléontologie

  • Paléoanthropologie

  • Paléobotanique


  • Paléoichnologie : le domaine de la paléontologie étudiant exclusivement les traces d'activité biologique fossilisées (ichnofossiles)

  • Institut de paléontologie humaine

  • Taxon fossile



Liens externes |



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